05 avril 2022
Lecture 3 mn
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La Directive Européenne sur les lanceurs d'alerte transposée en droit français par le Sénat
Le Sénat a adopté le 16 février 2022 la proposition de loi destinée à mieux protéger les lanceurs d'alerte. Un vote qui fait suite à la Directive européenne de 2019 que l’IFACI avait évoquée à l’occasion d’un webinar* en décembre 2021, animé par deux experts : Grégory Zouane, Chief Executive Officer chez Kalita Partners Europe, et Eric Seassaud, Avocat associé, SQUAIR. Quelles sont désormais les conséquences pour les métiers du risque?
C’est un sujet intéressant particulièrement les auditeurs et contrôleurs internes qui a fait l’objet de l’attention de sénateurs, les alertes se multipliant depuis quelques années au sein des entreprises françaises. Le 16 février 2022, la transposition de la directive européenne de 2019 sur les lanceurs d’alerte faisait l’objet d’un accord entre les deux chambres du Parlement français. Cette transposition devrait avoir pour conséquence une augmentation sensible des signalements. La proposition de loi définit en effet plus précisément le statut des lanceurs d’alerte, renforce leurs droits, institue un système de soutien financier et psychologique. Et elle va même en ce sens au-delà de la directive européenne.
La fin de l’obligation de signalement interne préalable
Un lanceur d'alerte ne sera désormais plus tenu de passer par un canal interne de signalement, mais pourra désormais faire appel au Défenseur des droits, à la justice, à un syndicat, une ONG ou une association habilitée. Un adjoint au Défenseur des droits sera d’ailleurs nommé pour assister les lanceurs d'alertes.
Facilitateurs et personnes en relation avec le lanceur d’alerte
Deux nouvelles catégories de personnes protégées, les « facilitateurs », personnes physiques ou morales qui accompagnent les lanceurs d'alerte, d’une part, et les « personnes en relation avec le lanceur d’alerte », d’autre part, bénéficieront du statut protecteur des lanceurs d’alertes.
Une probable « juridisation » des procédures et une rigueur accrue dans le déroulement des enquêtes
Pour Grégory Zouane, Chief Executive Officer chez Kalita Partners Europe, et Eric Seassaud, avocat associé chez Squair, qui avaient animé ensemble en décembre dernier un webinar à l’IFACI sur le sujet, l’une des principales conséquences du vote de la loi pour les auditeurs et contrôleurs internes, au-delà de la multiplication des alertes, pourrait être, avec le statut des facilitateurs, une probable « juridisation » des procédures d’alerte et une rigueur accrue dans le déroulement des enquêtes internes, qui impliqueront, selon les sujets, nombreuses fonctions de l’entreprise : éthique, compliance, juridique, audit, finances, achats, direction opérationnelle, communication, ressources humaines…
« Démontrer dans la conduite de leurs enquêtes internes que la présomption d’innocence a été respectée »
« Plus encore que par le passé, les entreprises devront démontrer dans la conduite de leurs enquêtes internes qu'elles ont respecté la présomption d’innocence des personnes mises en cause, la protection de l’identité des lanceurs d’alerte, des données personnelles des personnes faisant l’objet de l’enquête, et d’avoir pris des mesures pour préserver les éléments de preuve et leur intégrité, » expliquaient-ils. « Ainsi, dans la conduite des entretiens internes, il faudra notamment justifier de l’information préalable des personnes interrogées, notamment eu égard à leur consentement et à la possible utilisation en justice de leurs éléments de réponse. L’intervention de l’avocat pourra être envisagée dans le déroulement des enquêtes pour veiller à la régularité de celle-ci et à sa protection par le secret professionnel ».
Deux sondages sur les alertes éthiques et les enquêtes diligentées
À l’occasion du webinar de décembre 2021, les résultats de deux sondages auprès des organisations, portant d’une part sur le « nombre d'enquêtes diligentées par an à la suite des alertes éthiques reçues » et également sur « le nombre d'alertes éthiques au sens Sapin II reçues par an » avaient été communiqués. Ils concluaient qu’en France, les entreprises constataient rarement plus de cinq véritables alertes par an, l’essentiel des alertes n’entraînant (pour 58% des répondants) aucune enquête interne. Pour autant, les auditeurs internes ayant répondu à ces sondages, comme ceux ayant participé au webinar, confiaient être pleinement conscients que la question des lanceurs d’alerte allait prendre une place de plus en plus importante dans leurs métiers.
* À revoir ici : https://ifaci.workplace.com/events/265396428889052/?active_tab=discussion
Retrouvez les recommandations des deux experts ici
Plus d’informations sur la page de la « Tribu IFACI - Conformité, fraude & anti-corruption », dont les membres échangent et contribuent à l'élaboration de documentation sur le sujet.